En mai, rêve à ce qu'il te plaît !
- Nathalie Barre Tricoire

- 10 mai 2020
- 3 min de lecture
Chronique de mai 2020

Après plus d’un mois de « confinement », privés de notre liberté de mouvement pour permettre un accès aux soins à ceux qui en ont besoin, nous commençons à penser à la suite…et chacun la voit à sa manière…
Même si le virus est toujours là, même si l’avenir n’est jamais écrit et même si les perspectives annoncées ne sont pas très réjouissantes, peut-être cette période de confinement aura-t-elle permis de mettre en lumière, plus que jamais, l’utilité sociale mais aussi les limites de l’activité économique.
Je fais alors le rêve d’une vision plus juste du rôle essentiel de l’économie de marché et des entreprises dans notre vie quotidienne. Nos critiques faciles sur la société de consommation, sur le libéralisme ou la finance nous font oublier que nous sommes parties prenantes de cet « ensemble ».
Comme le dit Alain Eraly (docteur en sciences sociales et docteur en économie appliquée) dans son livre « quand les mots construisent la réalité », nous sommes « tout à la fois et pleinement, citoyen, travailleur, consommateur et épargnant ». Et ces quatre statuts pour une même personne conduisent à des contradictions que, bien souvent, nous ne voulons pas voir.
Nos entreprises, petites ou grandes, contribuent au lien entre les hommes et à la vie sociale. Par les échanges marchands, l’économie participe à la satisfaction des besoins vitaux et le « progrès de chacun contribue au progrès de tous ».
Un arrêt brutal comme nous le vivons aujourd’hui peut remettre en cause le fondement même de certaines activités humaines. La mise en sommeil de la plupart des entreprises et la suppression quasi-totale de l’activité économique privent ceux qui la subissent de leur travail et aussi de tout ou partie de leurs revenus.
La consommation pour des besoins « non essentiels » s’est fortement contractée pendant le temps du confinement, soit, moins de 3 mois, et une récession sévère nous est déjà annoncée, sans doute pour plus d’un an.
De quoi nous interroger sur les rouages de l’économie et lire ou relire l’ouvrage de Jean Tirole (prix Nobel d’économie en 2014) « Economie du bien commun » pour essayer de comprendre en quoi et comment l’économie contribue effectivement au bien commun.
Pour durer, une entreprise doit inscrire son action dans le temps long. Elle doit être solide au plan financier et donc, être gérée avec précaution…ne pas céder aux injonctions de ceux qui la trouvent toujours trop riche, ne distribuant pas assez aux différentes parties prenantes et jamais assez vite.
Car, l’économie, pour fonctionner « efficacement » comme l’analysait Adam Smith (« Theory of Moral Sentiments »), l’un des pères fondateurs de la science économique, réclame prudence, décence et confiance.
Or, les périodes fastes de croissance ont conduit à des excès. La crise de 2008 a mis en évidence la course effrénée aux profits par une mise à disposition d’une liquidité facile, la cupidité de certains acteurs économiques préoccupés par des gains rapides et l’insouciance de certains individus parfois, ignorant les risques, parfois, voulant les ignorer.
Et, peu nombreux sont ceux qui choisissent la modération et le bon sens plutôt qu’une prise de risque parfois inconsidérée et trop souvent présentée comme du courage ou une consommation « adulée » devenue trop souvent synonyme d’un « accomplissement identitaire ».
Et je fais aussi le rêve que les entreprises gagnent en responsabilité et ne renoncent jamais ni aux valeurs humanistes ni à la nécessaire recherche de l’équilibre financier (et donc du profit) par une définition concrète de leur « raison d’être » mais aussi et surtout de leur « façon d’agir ». Leur place, au sein de la société, doit intégrer la recherche de « sens » tant pour chaque individu que pour la collectivité mais aussi et surtout pour assurer sa légitimité et donc son existence à terme. Il faut, comme l’écrit Philippe de Woot, dans un livre qui en porte le titre « Repenser l’entreprise ».
Je fais enfin le rêve d’une prise de conscience forte au niveau des Etats pour poser un cadre éthique de l’économie, pour une régulation dont les principes seraient la recherche de solidarité entre les peuples et une répartition plus équitable des richesses pour poursuivre la marche du progrès de l’humanité.
Prenez soin de vous, ensemble, prenons soin de tous.



Je suis d'accord avec vos idées mais je pense aussi que si notre civilisation déraille c'est toujours à cause ses excès. De plus, la majorité de la population a oublié, avec les années d'hégémonie de la société de consommation, de la finance libérale et de l’argent facile, qu'elle était le vrai sens du mot économie. Le temps passe vite, prenez soin de vous et "carpe diem".